Bloke blogging about blogs
La blogosphère est grande. Technorati m'a appris aujourd'hui qu'il recense près de soixante millions de blogs. Ca fait beaucoup soixante millions. Ca fait plus que de doigts que sur mes deux mains réunies, plus que de doigts sur l'ensemble des gens que je connais, plus que de doigts sur l'ensemble des gens que j'ai déjà croisés et que je ne connais pas et plus même que de français qui iront aux urnes pour élire Nicol ... le nouveau président de le République en 2007. Mais sait-on bien ce qu'est un blog ? Et bien pas vraiment. Mais si, dit un jeune geek ambitieux au fond de la salle, c'est la contraction de Web log. Très bien, et c'est quoi un Web log ? Ben ... hébète-t-il à pleine hésitation. Bon alors, tu es gentil, on comprend pas quand tu parles, tu vas finir de compiler ton noyau Unix et tu vas me laver cette vilaine peau, comme dit quelqu'un dans un film, enfin plutôt comme quelqu'un fait dire à quelqu'un dans un film, à moins que ce ne soit de l'impro et là on ne s'y retrouve plus. Donc, disais-je, le seul dénominateur commun entre tous les blogs de ce monde, c'est que le temps y passe à l'envers, et que ce que l'auteur écrit après ce qu'il a écrit avant apparaît systématiquement au-dessus de ce qu'il a écrit avant, laissant perplexe le fidèle de la lecture de gauche à droite et de haut en bas, qui se demande au moment où il remonte dans le temps de façon incohérente, si cette traduction du japonais a été faite dans le sens du texte japonais ou quoi, crénondediou (Des esprits chagrins me diront sûrement que ça se configure ou que Skyblog je sais pas quoi. Je leur demanderai de relire les remarques faites au jeune ambitieux de tout à l'heure). Pour le reste, car au cas où ça n'était pas clair on cherchait à savoir ce qu'est un blog (ou un web log, pour ceux qui y tiennent), pas d'unité de forme, de contenu, de fond, de charte graphique ou de quoi que ce soit d'autre, à part peut-être le fait qu'être sur internet peut aider à être qualifié de blog. Et profitant de cette absence de contraintes, le blogueur juvénile ou moins juvénile en profite pour pousser sa créativité jusqu'à réinventer l'ensemble de la grammaire et de l'orthographe, projet qui peut paraître ambitieux, mais qui au final, ne constitue en pratique qu'un astucieux filtre de son lectorat, sur le critère de l'illettrisme (ouh, la vilaine discrimination !). Dans ce joyeux n'importe quoi, plus le flou légal dont on essaie de se convaincre qu'il existe (la blogalité), se lancent de nombreux auteurs - photographes - jeunes filles en fleur - voyageur - artistes - personnalités politiques en herbe ou pas (si vous connaissez quelqu'un qui est tout ça à la fois, je suis intéressé par faire sa connaissance), substituant à l'angoisse de la page blanche, l'angoisse que le modem décide une déconnexion sauvage au milieu de l'écriture du billet qui devait révolutionner l'histoire des idées.
Tout ça pour dire que même si on n'a qu'une vague idée de ce qu'ils sont, les blogs poussent comme les champignons dans les sous-bois après une pluie d'octobre (oh la champêtre image !) et que chacun s'essaie à la projection de ses états d'âmes à un public, dont il sait rarement décider s'il le veut large ou confidentiel. Du blog-notes au blogbuster en passant par "Ma vie, mon blog", le blogicien déballe des épisodes plus au moins autoblographiques, à l'image de la présente bloghorrée, tout en réalisant que les jeux de mots à base de blog, c'est vachement dur, et qu'il est impossible de placer où que ce soit "blogarithme népérien", sauf dans une phrase qui affirme que c'est impossible (Aïe ! le mal de crâne ! C'est l'incomplétude de Gödel qui réapparaît). Et à la fois nerveux comme une pucelle un soir de bal et chaud comme le Vélodrome un soir de match, à moins que ce ne soit le contraire, le blogueur se rend compte que quand Somerset disait que l'artiste "offre en pâture aux sarcasmes non seulement son physique et son moral, mais son oeuvre", il avait plutôt raison de considérer l'oeuvre comme la moindre des trois choses, toutes proportions gardées et avec la sportivité qui est de mise en pareilles circonstances, cela va sans dire, et ce alors même qu'il (le blogueur) n'a encore écrit qu'un billet qui lui tenait à coeur. Les méandres de la linguistique et les fioritures qui les assaisonnent feront que personne n'aura compris la précédente phrase, pas même son auteur, mais au cas où, comme dit Archimondain, envoyez-moi un courriel. Cet Archimondain doit être à ma connaissance la seule personne qui croit à la pérennité de ce terme et de ses petits semblables (pourriel, cadriciel, pollupostage et consorts) face à l'hégémonie Shakespearophone. Ah oui, tiens, en parlant de langue, en parallèle de la méticuleuse déconstruction de la langue française, émergent moults standards acronymiques anglophones, dont la compréhension nécessite à la fois une pratique poussée du charabia internaute ("L'internimportnawak") et une ouverture d'esprit d'équilibriste. Leur incompréhension, quant à elle, pousse parfois certaines personnes à m'envoyer des mails pour me demander ce que veut dire "lol" dans les commentaires de mon blog (Si ça vous fait rire, il est grand temps de désinstaller MSN et de revenir au jeune ambitieux d'il y a longtemps).
Avec mon ami Archimondain (encore lui, j'introduirais son blog prochainement), un jour où nous étions en pleine révolution, ce qui ne signifie pas que nous portions tous deux un bonnet phrygien à cocarde mais que l'alcool nous avait une fois de plus fait tourner la tête, nous nous sommes dit que bloguer, et bien c'était déjà écrire et, quand bien même nous ne parviendrions pas à rentrer dans le Panthéon des Blogueurs Disparus, ça vaut toujours mieux que de s'asseoir par terre en tailleur dans sa chambre en regardant vaguement les murs. Et ce n'est déjà pas si mal. Sur ce, tip of the hat à Djibril Cissé, Miss Picardie et ses dauphines, Wag of the finger à Pascal Sevran, Augusto Pinochet et Jimmy Carter, les dents et au lit.
Sam, blogger